Zimbabwe et chutes Victoria

Du 3 au 29 août 2018

Nous entrons au Zimbabwe par la ville de Mutare tout à l‘est du pays. Dans son histoire, la Rhodésie qui deviendra le Zimbabwe en 1980 connaît de terribles crises. Dans les années 70-80, alors que l’Afrique du Sud vit sous embargo, la Rhodésie développe une riche industrie produisant tout ce dont la région a besoin. Puis, sous le règne de Mugabe, qui y restera au pouvoir 37 ans, le pays s’effondre. Nationalisation des terres, répression de toute forme d’opposition, corruption… les blancs sont chassés du pays. Le pays, ruiné, finira même par perdre sa monnaie nationale suite à une hyperinflation. S’il reste quelques billets de 5 millions, la monnaie actuelle le Bond, a la parité avec le dollar (1 bond pour 1 dollars). Mais personne ne peut retirer plus de 20 bonds par semaine à la banque et cette monnaie n’a pas cours à l’extérieur du pays. Cette situation est des plus problématique, dans un pays où personne n’investit plus et où tout doit être importé.

Les banques sont ainsi en tel manque de devises qu’elles viennent les chercher auprès des changeurs de rue. Ainsi, au moment de notre passage dans le pays, 1 dollar US, vaut dans la rue 1.4 bond.

Face à ce manque total de liquidités, un acteur a tiré son épingle du jeu, Econet, l’opérateur téléphonique, qui permet d’échanger très simplement de l’argent en composant simplement le numéro du vendeur et le montant. L’opérateur prélève évidemment 2% au passage. C’est la manière la plus simple de payer, même le vendeur de tomates au marché. Et en plus, pour nous, 1 dollars US valait au moment de notre passage 1.7 ecocash, et le cours était même 1 pour 2 une semaine plus tôt, juste avant les élections…

Oui, nous sommes au Zimbabwe la semaine qui suit l’élection du nouveau président : le bras droit de Mugagbe, qui l’a forcé à partir à 97 ans… Des troubles qui se sont déroulés dans la capitale, nous ne verrons rien, et ne parlerons que peu de politique avec les gens, semblent-ils peu surpris par le résultat de cette élection ‘démocratique’.

À Mutare, nous prenons soin de notre véhicule et dormons au golf club où nous passons une belle soirée en compagnie de la communauté blanche. Nés au Zimababwe, ils ont souvent passé une dizaine d’années à l’étranger entre 2002 et 2012, la situation était alors trop difficile.

L’un de nos interlocuteurs est le directeur d’une chaîne de montage automobile qui pouvait compter jusqu’à un millier d’employés. Aujourd’hui, ils sont 150 et montent des bus et camions chinois.

De Mutare nous partons vers le sud et l’ouest du pays. La région est montagneuse et nous plaît particulièrement. Nous passons 2 jours à Vumba, puis 2 à Chimanimani.

Nous parcourons ensuite le sud du pays, sur des routes en très bon état, malgré leur âge.

Nous nous arrêtons dans la ville de Masvingo pour nous ravitailler. La ville possède un parc dans lequel des machines de l’époque de la machine à vapeur sont exposés. Vu leur état de conservation, ils ont du servir jusqu’à peu…

De là, prenons le chemin du ‘Great Zimbabwe’. Ce sont les plus grandes ruine sub-saharienne. Au 13 et 14ème siècle, les rois de l’époque ont érigé une cité qui rayonna sur toute la région. Les murs épais et l’organisation de la cité, autant que divers objets de cultes ancestraux, font la fierté de la nation.

Au moment de quitter le site, nous voyons un camping-car, un type de véhicule que l’on ne rencontre quasiment jamais dans cette région du monde. Intrigués, nous nous approchons… des plaques suisses!!! Et en plus, c’est une famille francophone! Trop bien… Damien, Messaouda et leurs deux filles Sohane (11 ans) et Syrine (13 ans) sont comme nous en voyage autour du monde. Après 6 mois en Amérique du Sud, ils sont maintenant pour 6 autres mois en Afrique. Enfin, les enfants peuvent jouer et discuter avec des copines presque de leur âge et qui de surcroît parlent français! Rapidement, les jeux s’organisent et les parents échangent leurs expériences et questions de voyageurs. Intéressant de voir comme chaque famille s’organise, gère les questions d’école, de santé, de sécurité. De comparer les rythmes, les préoccupations et l’organisation. Avec un grand respect mutuel, nous échangeons, discutons… pour nous c’est la première fois que nous rencontrons une famille en voyage autour du monde. Nous passons ainsi une journée complète avec eux, partageant les repas, tout en vaquant à nos occupations habituelles, telles que lessive, maintenance du véhicule, cuisine, vaisselle…

Deux jours plus tard, ne sachant pas bien si nous nous reverrons, nous continuons notre chemin vers la deuxième plus grande ville du pays, Bulawayo. Arrivés à proximité, un bruit sourd lors de l’accélération et une perte de puissance du moteur nous oblige à nous arrêter. C’est comme si l’embrayage glissait… Au lieu d’aller voir les grottes et les peintures rupestres prévues, nous allons en ville. Le lendemain matin, nous passons dans divers garages pour savoir qui serait le mieux qualifié pour nous aider. Tous nous envoient chez Anderson Motors. Lorsque nous nous y rendons, dans l’après-midi, le patron hurle sur un dépanneur qui lui a amené une voiture en lui disant qu’ils n’ont pas le temps de s’occuper de lui. Le chef d’atelier nous prend à part et fait un tour avec nous pour se faire une idée de notre problème. Son souci, c’est que nous sommes en période de vacances et que le mécanicien à même de s’attaquer à une boîte à vitesse ne revient que lundi, et nous somme jeudi soir… le vendredi, nous cherchons une solution alternative, mais tout le monde nous renvoie invariablement au même garage et nous décidons d’attendre lundi.

Nous passerons ainsi deux jours forts instructifs au musée d’histoire naturelle de Bulawayo. Au programme pédagogique: géologie, dont notamment l’exploitation d’une mine d’or et la formation de la terre ; évolution de l’homme et histoire tribale et coloniale de la Rhodésie ; animaux empaillés de toutes sortes allant de l’innombrable collection d’insectes, aux animaux de la savane, sans oublier les serpents vivants présents dans le pays (mamba noir et vert et autre python, tous plus effrayant les uns que les autres, et qui, au dire des locaux, peuplent à notre insu nos bivouacs quotidiens).

Le lundi, nous nous présentons au garage. Après une première analyse, notre hypothèse selon laquelle notre problème proviendrait de la boîte à vitesse semble se confirmer… Mais la démonter n’est pas une mince affaire ! Une fois ouverte, il faudra trouver les pièces de rechange, évidemment inexistantes au Zimbabwe. Mais le patron se rend toutes les deux semaines en Afrique du Sud et a prévu un voyage à la fin de la semaine. Nous devrions donc pouvoir avoir des pièces de rechange en une dizaine de jours. Mais cela signifie pour nous de nous retrouver bloquer avec notre maison dans un garage bondé pendant deux semaines! Pas réjouissant du tout!! Avant de commencer un quelconque travail, le patron, avec qui Pierre-Michel a déjà sympathisé, veut se faire lui-même une opinion. Il inspecte le moteur… et… trouve la cause du problème!! Le tuyau ramenant les gaz d’échappement au turbo a cédé. Quinze minutes plus tard, le bout de tuyau est remplacé et la panne réparée! Ouf!!! Et en plus le patron ne veut même pas être payé!! Merci Monsieur Anderson !

Il est déjà midi et même si nous avons très envie de reprendre la route, nous décidons d’aller jeter un coup d’œil, sans grande attente, à la piscine qui nous a été recommandée. C’est bien sympa comme endroit! Divers toboggans et bassins offrent aux filles une belle après-midi de défoulement!

Notre envie d’avancer nous pousse à renoncer à retourner en arrière pour voir les grottes et peintures rupestres et à prendre la route vers les chutes Victoria, à 400km plus au Nord. Une grosse étape de route, près de huit heures… mais n’oublions pas que nous voyageons avec notre maison. Sur route goudronnée, aucun souci pour aller aux toilettes ou préparer des sandwiches en roulant. Nous avons accès à tous les jeux et bien entendu à tout le matériel scolaire… En quelque sorte, une longue journée de route est comme une journée passée à la maison un jour de pluie. On ne sort pas, on s’occupe, on écoute Harry Potter… à la différence qu’il est à tout moment intéressant de regarder par la fenêtre pour admirer cette Afrique, si différente de notre quotidien européen…

Nous décidons de bivouaquer quelques kilomètres avant la ville touristique de Vicfalls (Victoria Falls). Nous arrivons au coucher du soleil dans un coin, à proximité de la piste, suffisamment à l’écart des habitations pour être tranquilles pour la nuit. Il faut dire, qu’avec notre véhicule, une fois à l’intérieur, les portes et les rideaux fermés, quasiment aucune lumière ne s’échappe et nous sommes en sécurité… nous pouvons ainsi, sur le principe, nous arrêter n’importe où, dans la brousse, sur un parking, dans un village… cuisiner un bon repas et passer une nuit agréable dans nos bons duvets douillets…

Le lendemain matin, après le petit déjeuner, trois enfants jouent à proximité de nous. Nous nous approchons pour faire connaissance. La plus grande fille, qui dit avoir 15 ans, parle parfaitement anglais, comme souvent au Zimbabwe. Nous apprenons ainsi qu’elle vit à quelques centaines de mètres de là avec sa mère, sa grand-mère, sa sœur et ses deux petits frères… nous lui demandons si elle est d’accord de nous faire visiter le coin… elle nous emmène alors voir le puit, leur jardin où pousse quelques épinards et haricots et nous conduit ensuite à sa maison. Organisé en groupe familial et non en village, sa famille vit dans quatre huttes, deux pour y dormir, une pour y cuisiner et une pour garder les réserves de grain. Au milieu de cet espace, un grand foyer où l’on se rassemble le soir pour écouter les contes racontés par la grand-mère. La fille, rejointe par quelques copines, nous mène ensuite au village où se trouvent l’école primaire, le dispensaire et l’église. Chrétiens, ils n’ont, selon elle, plus de rites traditionnels. Nous sommes dans le fond assez surpris d’une certaine pauvreté ‘tribale’, du moins dans ce qui nous est permis de comprendre… Mais il est vrai que, dans l’histoire du pays, les colons ont banni les rites ancestraux et interdit les croyances traditionnelles favorisant la christianisation. La médecine occidentale a remplacé les sorciers et la médecine traditionnelle. Et aujourd’hui, on rêve de se marier en belle robe blanche, marque de son statut social… Naïvement et dans une réflexion tout à fait ethnocentrique, nous avions rêvé d’une Afrique plus empreinte de musique, de folklore et de traditions… à la place nous avons les supermarchés dans les villes et un accès internet quasiment partout…

Nous voici donc aux chutes victoria. Depuis que Livigstone a révélé ce lieu mythique au monde occidental en 19xx, son attrait touristique n’a jamais faibli. Le projet de train transafricain passait évidemment par là, comme la Jungle Jonction, la ligne aérienne reliant l’Angleterre à l’Afrique du Sud, au temps des hydravions à hélices, qui amerrissait non loin, sur le Zambèze. Aujourd’hui aussi, Vicfalls est un lieu particulier, hautement touristique, avec ses restaurants haut standing et ses énormes marchés d’art et de souvenir. Incontournable pour tous les voyageurs dans la région, nous y retrouvons Wilbert et Marianne, ainsi que notre famille suisse… tous réuni au Shoestring Packpakers Lodge…

Nous y faisons la connaissance de Tony, qui tiens le café, un Zimbabwéen très intéressant qui a travaillé dans le monde entier, généralement dans le tourisme… Intarissable sur tous les sujets, nous parlons géopolitique, voyage et surtout cuisine. Il est fasciné par notre robot ménager, le thermomix, que nous avons emporté avec nous et que nous utilisons quotidiennement ! Nous voici engager dans un atelier cuisine ! Au menu : biscuit (cookies au chocolat) et pizza…

Après avoir bien socialisé pendant deux jours, il est grand temps d’aller voir ces fameuses chutes… Indubitablement, c’est une des merveilles du monde ! Vraiment impressionnant ! Wahou !!!

Nous sommes fin août et le 28 c’est l’anniversaire de Jeanne. Nous décidons de rester quelques jours de plus pour éviter de nous trouver en route le jour de l’anniversaire. En cette occasion, si vous suivez notre blog, nous devons trouver des… sushi ! eh oui… Et bien dans une ville touristique, ce devrait être possible… Nous sortons nos plus beaux habits pour nous rendre au Victroria Falls Hotel, une splendide bâtisse coloniale, dans la plus pure tradition victorienne. Le buffet du soir avec spectacle est varié, sans pour autant être hors de prix et offre des sushis, mais également du crocodile, des glaces maison et un savoureux plateau de fromages !!! Nous en ramenons même en douce un bout à nos amis hollandais… tous les Européens vous le dirons, ce qui manque le plus en Afrique, c’est du bon fromage…